L'art de l'Afrique Noire
UNIVERSITE DE KOUDOUGOU Burkina Faso
------------ Unité-Progrès-Justice
Unité de Formation et de Recherche en
Lettre et Science Humaine (UFR/LSH)
------------
Département : Histoire et Archéologie
Niveau d’étude : Licence
Module : Histoire générale de l’art
Professeur : Mme ZAGRE
THEME 16 :L’ART DE L’AFRIQUE NOIRE
Membres du groupe 14
Noms Prénoms
SAWADOGO Jules
SAWADOGO Moustapha
SAWADOGO Mireille
SININI Hermann
SINOU T. Alima
SOMBIE Souleymane
SOMDA Millè
SOME Claude
SONDE Mariam
SOUNTOURA Emile
Année académique 2011-2012
PLAN
INTRODUCTION
- I. Définition et présentation de l’art de l’Afrique Noire.
- Définition
- Présentation
- II. LES DISTINCTIONS REGIONALES
- L’art de la savane d’Afrique Occidentale
- L’art de la foret d’Afrique Occidentale
- L’art de l’Afrique centrale, Afrique de l’est et Afrique du sud
- III. LES FONCTIONS DE L’ART AFRICAIN TRADITIONNEL
- Fonction magico-religieuse
- Fonction économique
- Fonction économique
- Fonction historique et thérapeutique
- IV. L’ART AFRICAIN COMTEMPARAIN ET LES DIFFICULTES DE L’ART DE L’AFRIQUE NOIRE
- L’art africain contemporain
- Les difficultés de l’art de l’Afrique noire
CONCLUSION
INTRODUCTION
Le continent africain abrite une variété de sociétés caractérisées chacune par son langage, ses traditions, ses formes artistiques, etc. qui ne cessent d’évoluer au rythme des transformations culturelles et sociales. Ces sociétés accordent une place très importante à l’art qui se veut être la tribune de leur expression, leur désir, leur volonté, leur espoir … C’est dans cette optique que s’inscrit notre thème : << l’Art de l’Afrique Noire>>.
Dès lors que pouvons-nous retenir de l’art de l’Afrique Noire ? Quelle est la spécificité de l’art africain?
Il s’agira pour nous, dans la présente analyse de définir et de présenter l’art de l’Afrique Noire, ensuite de faire ressortir les distinctions régionales. En sus, nous mettrons en exergue les fonctions de cet art et enfin nous ferons cas de l’art africain contemporain et des difficultés de l’art de l’Afrique Noire.
- I. DEFINITION ET PRESENTATION DE L’ART DE L’AFRIQUE NOIRE
- 1. Définition
L’art de l’Afrique Noire, au sens large, est l’ensemble des productions artistiques des peuples passés et actuels d’Afrique Noire.
Selon JEAN GABUS, l’art africain :<< c’est une traduction faite système, la pulsation d’une société bien plus que celle d’un individu. L’expression d’un drame collectif, un langage sacré, un rituel classique, des formules magico-religieux pour vivre et survivre, enfin des outils surnaturels>>.
Pour HAMADOU HAMPATE BA, l’art africain est d’abord destiné aux dieux. C’est l’invocation des esprits ancestraux auxquels on confère des corps et des formes concrets de manière à ce qu’ils puissent entrer dans le monde
- 2. Présentation de l’art de l’Afrique Noire
L'art africain reflète la richesse de l'histoire, de la philosophie, de la religion et des sociétés de ce vaste continent. Il a inspiré certains des courants les plus importants de l’art moderne du monde occidental lors de la découverte de l'art nègre par les peintres cubistes du début du XXe siècle. Ceux-ci ont été les premiers à reconnaître au travers d’un esthétisme déroutant les valeurs humanistes des populations du sud du Sahara, à admirer la puissance d'abstraction de cet art, et ont trouvé là une stimulation pour mieux dépasser l’approche naturaliste.
L'histoire de l'art africain remonte aux temps néolithiques, avec les peintures et les gravures rupestres qui, de la Mauritanie au Fezzan et du Tassili à l'Ennedi, sont présentes dans presque tous les massifs sahariens (6000 av. J.-C.-Ier siècle apr. J.-C.). Plus au sud, les sculptures de terre cuite modelées par les artistes de la civilisation Nok dans le centre du Nigeria (500 av. J.-C.-200 apr. J.-C.), et qui, selon l’enseignement tiré des fouilles récemment entreprises, sont associées à des vestiges de travail du fer ; ces sculptures préfigurent, dans le même pays, les bronzes décoratifs d'Igbo Ukwu (IXe-Xe siècle apr. J.-C.), les extraordinaires sculptures de bronze et de terre cuite d'Ife (XIIe-XVe siècle apr. J.-C.) et celles du Bénin (XIIe-XIXe siècle). Elles montrent une telle maîtrise technique et sont rendues avec tant de naturel que l'on y a d'abord vu, à tort, une inspiration classique.
Cette tradition artistique porte sur la sculpture (statues et masques), l'architecture (habitations, greniers), les meubles, la poterie, le tissage et les bijoux. La parure corporelle, signe de distinction et de protection contre les mauvaises influences (peintures corporelles, coiffes et coiffures, scarifications et tatouages), les décors polychromes sur les habitations et les greniers, ainsi que les tissages forment également une part importante de la symbolique et de l'héritage artistiques.
Les matériaux les plus courants sont le bois, la fibre, la peau animale, le métal (fer, bronze et or), l'ivoire, l'argile, la terre et la pierre. Les formes représentées dans chaque matériau varient d'un naturalisme relatif à un art totalement abstrait, les styles se conformant à la tradition esthétique de chaque zone culturelle (désert, savane ou forêt). L'art africain, reflet de la vision du monde visible et surtout invisible, est un art religieux qui porte une attention scrupuleuse à la préservation des formes traditionnelles.
Les artistes étaient des artisans chargés par la communauté ou la société des masques de transmettre les formes héritées des ancêtres ; leur formation se faisait au contact des sculpteurs plus âgés. Formation autant religieuse qu'artistique, car représenter l'image emblématique et symbolique de l'ancêtre fondateur de la communauté ou du génie protecteur du village tenait autant à une bonne connaissance du monde invisible qu'à la bonne transmission des formes à travers une initiation spécifique sur la signification des formes et le respect des rituels appropriés lors du choix du bois ou des outils à utiliser hors du regard des profanes. Dans les royaumes centralisés de l'ancien Ghana, d'Ife et du Bénin, au Nigeria comme au Congo (chez les Kuba), les forgerons vivaient à l'intérieur du palais royal et des systèmes de guildes contrôlaient leur apprentissage. La profession était le plus souvent héréditaire, la connaissance se transmettant de génération en génération, car représenter l'image du roi ou d'un être mythique ne pouvait se faire qu'avec l'accord des ancêtres ou des divinités qui en avaient accordé le don à un lignage. Chez les Dogon et les Bambara du Mali, les sculpteurs appartenaient à la caste des forgerons. Ils connaissaient les arts du feu et ne se mariaient qu'au sein même de leur caste, leurs femmes étant elles-mêmes potières. Bien que marginaux, ils étaient craints et respectés pour leur connaissance de la métallurgie qui leur assurait une place toute particulière dans la société (les forgerons pratiquaient aussi les circoncisions). Le lieu de travail et les matériaux employés avaient leur importance et faisaient souvent l'objet d'une prescription particulière impliquant des interdits alimentaires ou sexuels. Les masques étaient fabriqués dans le bois sacré ou dans une grotte, symbole du ventre maternel où ils devaient être gardés avant leur prochaine sortie à l'occasion d'une cérémonie, secrète ou publique.
4 |
- II. LES DISTINCTIONS REGIONALES
Bien que très différentes, les civilisations de l'Afrique subsaharienne peuvent être regroupées par régions géographiques en fonction du climat, de la topographie et de l'organisation sociale. Certaines de ces cultures ont disparu ; d'autres survivent, et leur tradition artistique se perpétue. Ainsi, les masques de la savane s'identifient à l'espace et sont hauts, fins et élancés. Ceux de la forêt sont plutôt de faible dimension, moins naturalistes et s'attachent plus à montrer un visage humain et l'inquiétante profondeur de la forêt. Toutefois, il ne faut pas oublier que les sociétés fabriquant des masques sont minoritaires au sein de la population africaine, et que dans une même région, certains peuples font des masques, d'autres pas, en particulier les nomades et les populations islamisées ou christianisées.
|
Cette région du monde offre un panorama exceptionnel en matière d'art traditionnel avec les œuvres des Dogon, des Bambara, des Mossi, des Bobo et des Tamberma, qui habitent les savanes herbeuses du Mali, du Burkina et du Nord-Togo. Les arts des Dogon, un peuple habitant des falaises escarpées du Mali où les hommes se sont réfugiés, fuyant les invasions, ont fait l'objet d'études très poussées. La richesse de leur philosophie s'exprime à travers une forte puissance évocatrice. Le plan du village dogon, par exemple, est considéré comme une forme humaine, représentant les Nommos, les premiers hommes créés par le Soleil et dieu créateur. Les secteurs importants du village sont sa tête (la case des hommes et de la forge), sa poitrine (les cases des chefs du lignage), les mains (les cases des femmes), les parties génitales (un mortier et un autel) et les pieds (les tombes). Les masques dogons, sculptés pour les cérémonies de l'association masculine, l'Awa, représentent l'image que les Dogon se font du monde, avec les animaux et les hommes qui le peuplent. L'antilope, l'oiseau, le lièvre, les femmes peul et les hommes samana, parmi d'autres personnages, apparaissent dans les cérémonies funéraires. D'autres masques sortis lors de ces occasions incarnent des concepts philosophiques plus abstraits. L'un d'entre eux, un long masque serpent de 9 m, rappelle l'origine de la mort. Un autre, le masque Kanaga, recrée les origines du monde en fonction des figures exécutées par celui qui le porte.
Les masques des Bambara et des Marka des populations voisines, s'en rapprochent et, comme eux, sont utilisés dans les cérémonies des moissons, les funérailles ou les initiations. Ils reflètent l'influence réciproque des uns et des autres.
Au sud-est, chez les Tamberma du Nord-Togo, l'architecture des cases a atteint un sommet de beauté et de complexité symbolique. Leurs « châteaux » de terre à deux étages ne sont pas de simples habitations, mais des forteresses et des diagrammes cosmologiques. Le nom qu'ils se donnent, Batammariba ou « peuple architecte », traduit l'importance que l'architecture revêt pour eux. Tout comme le village dogon, chaque maison tamberma est considérée comme un être humain. C'est pourquoi ses façades externes portent des scarifications, tracées sur le même modèle que celles des femmes. La maison porte aussi les noms des parties du corps, comme la porte « bouche », la fenêtre « yeux », la meule « dents », etc.
|
||
La grande zone forestière qui borde le golfe de Guinée est remarquable par la diversité de ses cultures et de ses arts, en Guinée, en Sierra Leone, au Liberia, en Côte-d'Ivoire, au Ghana, au Togo, au Bénin et au Nigeria. Sur la côte, la sculpture s'exprime à travers les masques des associations masculines et féminines comme le Sandé et le Poro. Chez les Mende de Sierra Leone, le Sandé, une association féminine, fait appel à des masques de bois dur synonymes de richesse et de beauté ; ils sont portés par les responsables de l'association féminine durant les cérémonies d'initiation des jeunes filles. Les plus beaux de ces masques reproduisent ce que les Mende admirent le plus dans leurs propres traits : un front haut et lisse, une coiffure élaborée et symbolique, un cou puissant et élégant.
Le masque est également omniprésent dans les cérémonies du Poro, l'association masculine qu'on retrouve chez les Dan, les Krahn et les Guéret du Liberia et de la Côte-d'Ivoire voisine. Ces masques représentent des membres éminents de la société : entre autres, le juge, le chanteur et le coureur. Ils mettent tout particulièrement l'accent sur l'élégance des formes, le poli des visages et les coiffures savamment élaborées et tressées. Lorsqu'ils ne sont pas portés, les masques, qui ne doivent pas être vus des non-initiés, sont rangés en sûreté dans une case faisant l'objet d'un interdit.
C'est au Ghana, au Togo, au Bénin et au Nigeria, dans les régions côtières, que l'on trouve quelques-uns des arts de cour les plus remarquables d'Afrique. Le royaume le plus connu des Occidentaux est celui de Bénin, au Nigeria. La cité royale de Bénin (dont il ne faut pas confondre le nom avec celui du pays voisin, récemment rebaptisé Bénin) a connu son apogée aux XVIIe et XVIIIe siècles, quand il est entré en contact avec les Européens. Le palais du roi, l'oba, était impressionnant. Ses murs étaient couverts de magnifiques plaques de bronze moulées à la cire perdue, qui, disait-on, resplendissaient comme l'or. Les trois bâtiments principaux du palais étaient surmontés de tourelles portant des oiseaux et des pythons en bronze. Sur les autels du palais royal, des têtes et des sculptures commémoratives de bronze étaient présentées, surmontées d'une énorme défense en ivoire sculptée.
|
Dans les forêts équatoriales qui s'étendent du Gabon à la République démocratique du Congo et dans divers pays de l'Est et du Sud, d'autres formes artistiques méritent d'être mentionnées. Dans les cultures matrilinéaires de la partie méridionale de la République démocratique du Congo, les statuettes féminines revêtent une grande importance comme chez les Luba, célèbres pour les tabourets sculptés et les statues du genre « mère à l'enfant ». Chez les Pende, par exemple, la case du chef est souvent surmontée d'une représentation de femme grandeur nature. Elle tient parfois un enfant (symbole de la lignée et des futurs héritiers) et une hache (symbole du Pouvoir et du Tonnerre).
Plus loin, chez les Gato, les Bongo et les Konso du Soudan et d'Éthiopie, des poteaux de bois sculpté commémoratifs étaient installés dans les principaux endroits du village pour protéger son entrée et les tombes des ancêtres. Dans la plupart des autres cultures d'Afrique orientale, la sculpture monumentale est rare. En revanche, chez les peuples pastoraux, la parure corporelle tient une grande place. Les Massaï du Kenya et les Zoulou d'Afrique du Sud sont connus pour leurs bijoux de perles (il s'agit généralement de perles colorées minuscules obtenues par le commerce swahéli). Les formes circulaires que l'on remarque dans les bijoux massaï se retrouvent dans les plans des villages bantous de la même région. Près de Fort Victoria (Zimbabwe actuel), les grands cercles de pierre et le bâtiment de pierre elliptique de l'ancienne civilisation du Zimbabwe (v. 1200), qui a précédé le royaume du Monomotapa connu des Européens, font partie de cette tradition de l'architecture circulaire.
En Afrique australe, région qui a connu de grands bouleversements avec l'arrivée des pasteurs bantous du Nord et des fermiers blancs (Boers) du Sud, les statues et les masques ne sont guère présents et les migrations depuis trois siècles n'ont pas beaucoup tenu compte des génies ni des ancêtres fondateurs. Ici, l'art se remarque surtout dans les décors muraux polychromes et géométriques. Les Bochiman, premiers habitants de la région et auteurs de nombreuses peintures rupestres, ont été refoulés dans le désert du Kalahari à l'arrivée des Blancs et des Bantous
- III. LES FONCTIONS DE L’ART DE L’AFRIQUE NOIRE
- 1. Fonction magico-religieuse
C’est la fonction la plus importante de l’art africain. Aux productions artistiques qui font souvent l’objet de culte, on attribue souvent des fonctions magiques. La relation entre l’art et la religion est très ancienne et on admet que c’est la religion qui a permis à l’art d’éclore.
L'art africain a des fonctions religieuses, sociales, politiques, économiques, historiques et thérapeutiques. Il couvre des champs aussi variés que les institutions qui font appel à lui pour transmettre des messages destinés à être compris par des publics particuliers.
|
L'une des fonctions les plus importantes de l'art est indubitablement sociale. Par exemple, il décrit les femmes comme des mères soignant ou berçant leur enfant. Les hommes, en particulier les chefs traditionnels, sont souvent représentés comme des ancêtres, des guerriers à cheval ou équipés pour la guerre. Les thèmes sociaux sont également très répandus dans les cérémonies où interviennent des masques. Dans ces réunions, des personnages, incarnés par un danseur portant un masque et un costume végétal approprié, jouent toutes sortes de rôles en mimant des comportements sociaux. Les masques figurant les personnages typiques de la société (le fonctionnaire corrompu, la vieille fille, la marchande), et qui complètent le théâtre populaire ou de marionnettes, sont présentés avec leurs caractéristiques propres (un ananas ou une machine à coudre au sommet d'un masque de la société gelede chez les Yoruba ; un masque noirci au nez retroussé porté par un danseur habillé de guenilles pour figurer la vieille fille laide dans le masque agibeza (qui signifie quelque chose comme « vieille calebasse cassée » chez les Pende du Congo-Kinshasa.) Dans les cérémonies des Ijaw et des Ibo du Nigeria et des Tchokwe du Congo, on reconnaît divers personnages asociaux comme l'avare, le gourmand, la prostituée, le médecin incapable ou l'homme de loi véreux. Dans les cérémonies Egungun, chez les Yoruba, le bavard, le glouton et l'étranger aux façons bizarres sont des modèles antisociaux.
L'art joue également un rôle majeur dans le pouvoir politique. Chez les Dan (Liberia, Côte-d'Ivoire), les Kota (Gabon), et d'autres encore, les juges ou les policiers de la communauté portent des masques spéciaux ; il en est de même des hommes chargés de maintenir l'ordre et d'effrayer les jeunes dans les camps d'initiation. Les hommes masqués Kwele Gon du Gabon sont un exemple significatif de ce type de personnages officiels. En raison de leur anonymat et de leurs pouvoirs, ces personnages masqués peuvent enfreindre les codes sociaux et les interdits, par exemple en redistribuant de la nourriture dans les périodes de grande disette. Des statuettes et des motifs architecturaux participent également au contrôle de la société. Les faces énigmatiques et abstraites des reliquaires des Kota, des Sogo et des Fang du Gabon, par exemple, sont destinées à protéger du vol et du mauvais sort les reliques des ancêtres. Les Dogon du Mali et les Sénoufo de Côte-d'Ivoire sculptent des portes de cases et de greniers très ouvragées, mettant sous la protection des ancêtres et des génies bénéfiques les provisions et les objets sacrés.
|
L'art tient également une place importante dans l'économie. Les élégants cimiers d'antilope Tyi Wara en bois des Bambara du Mali se portent sur la tête lors des cérémonies des semailles et des récoltes. Tyi Wara, l'inventeur mythique de l'agriculture pour les Bambara, se serait enterré dans un acte sacrificiel. La danse des masques Tyi Wara sur les champs cultivés (la tombe même du bon génie Tyi Wara) revêt deux significations : elle honore le héros et rappelle aux jeunes agriculteurs bambara le dur sacrifice qu'ils doivent à leur tour accomplir chaque année. Chez les Sénoufo de Côte-d'Ivoire, des statuettes délicatement sculptées servent de la même façon à encourager les cultivateurs. Ils plantent dans le sol, à l'extrémité des rangs de plants cultivés, des bâtons daleu ornés d'un oiseau ou d'une femme. Ces bâtons servent de buts, de marques ou de trophées dans les concours de plantation.
- 4. Fonctions historiques et thérapeutiques
L'art africain peut être un rappel des événements passés ; ainsi les Dogon du Mali ont-ils sculpté de nombreuses représentations de leurs ancêtres légendaires, les Nommos, descendus du ciel au commencement des temps. Ces représentations de Nommos (dont certains lèvent les bras vers le ciel, leur village d'origine) occupent une place importante sur les portes des greniers et comme décors de piliers dans l'architecture sacrée.
Dans la riche cité-État de Bénin, au Nigeria, des plaques de bronze, obtenues par le procédé de la cire perdue, représentent elles aussi des personnages importants et des événements passés : rencontres de dignitaires et de soldats étrangers (arquebusiers portugais), scènes de batailles, fêtes royales, nobles en tenue d'apparat, cérémonies religieuses et musiciens. Il en est de même dans le royaume d'Abomey (actuelle république du Bénin) dont le palais royal était entouré de bas-reliefs de ce genre, en pierre ou en stuc. Des tentures en broderies polychromes portant, comme un blason, le symbole ou la devise de chaque roi, légitimaient le souverain du moment.
Les thérapies traditionnelles nécessitaient des formes artistiques particulières. La divination, moyen de déterminer la nature des problèmes et leurs solutions potentielles, a joué un rôle très important dans la production des œuvres d'art. Les devins ifa, chez les Yoruba (Nigeria) ou les Fon du Dahomey, utilisaient des plateaux de divination en bois de forme circulaire et des coupes, éléments essentiels de leur équipement rituel. De la même façon, les Baoulé de Côte-d'Ivoire utilisaient des vases de divination sculptés contenant des objets pour rendre leurs oracles. Chez les Kongo du Congo, des fétiches de bois transpercés de clous de fer avaient le pouvoir d'éloigner le danger et les blessures et de renvoyer les mauvais sorts.
.
|
Bien des arts africains dits traditionnels sont encore de nos jours commandés, sculptés et utilisés comme autrefois. Comme dans toute période artistique coexistent innovations et courants conservateurs. L'évolution des transports et des communications, le cinéma, les musées, les expositions et l'élaboration d'une histoire africaine fondée, non pas sur l'ethnographie et les textes étrangers comme du temps de la colonisation, mais sur l'archéologie et ses techniques de fouille et de conservation, ont favorisé la diffusion des formes artistiques. L'exode rural, le melting pot que constituent les cités ainsi que l'immigration temporaire ou définitive vers d'autres pays ou d'autres régions en voie de développement ont joué le même rôle. Aujourd'hui, par exemple, des masques de style nigérian sont utilisés dans des régions du Ghana et sur la côte orientale du golfe de Guinée.
L'art africain a également subi des influences extérieures. Des exemples d'architecture et de motifs islamiques se retrouvent dans de nombreuses régions du nord de l'Afrique noire, notamment au Nigeria, au Mali, au Burkina et au Niger. Les grandes mosquées récentes de style marocain, libyen ou saoudien édifiées dans les pays du Sahel ne sont pas sans influencer les artistes locaux, ne serait-ce qu'à travers l'imagerie populaire des pagnes et des décors des objets usuels. Ainsi retrouve-t-on des motifs d'impressions indonésiens sur les pagnes du golfe de Guinée (les wax). Des thèmes chrétiens ont été adoptés par certains artistes pour les décors de panneaux, de portes et de fonts baptismaux des églises et des cathédrales de l'Afrique chrétienne (les palais des rois de Gondar en Éthiopie ont été édifiés au XVIIe siècle par des architectes indiens alors que l'influence portugaise était encore importante). De nos jours, des œuvres ont été réalisées avec l'aide des banques, des établissements commerciaux, des administrations, de l'Unesco et grâce à la participation des anciens colonisateurs. Le tourisme contribue à entretenir la demande en objets d'art traditionnels, mais ceux-ci ont perdu leur fonction religieuse. Les forgerons, artisans et artistes, autrefois responsables devant leur communauté du respect des formes qui devaient héberger un ancêtre ou un génie, ont perdu la notion du sacré qui s'attachait à leur œuvre.
Le premier festival mondial des Arts nègres de Dakar, en 1966, a montré au monde, et à l'Afrique elle-même, que l'art africain ne se limite pas à quelques masques qualifiés de « primitifs », mais qu'il reflète l'aboutissement d'une évolution des formes commencées depuis six millénaires par des décors de poteries et des peintures rupestres. La création d'écoles d'art et d'architecture dans les villes de l'Afrique subsaharienne (à l'image de la fameuse école de Poto-Poto à Brazzaville) encourage les artistes à travailler de nouveaux matériaux comme le ciment, les peintures à l'huile, l'encre, la pierre, l'aluminium. Leurs images et leurs dessins tentent des synthèses souvent étonnantes entre les traditions de l'Afrique et celles du monde contemporain, renouvelant, en un juste retour des choses, les audaces des admirateurs de l'art nègre. Des artistes comme Ousman Sow et Assane N'Noye du Sénégal, Paul Ahyi du Togo, Twins Seven et Ashira Olatunde du Nigeria et Nicholas Mukomberanwa du Zimbabwe sont parmi les plus remarquables dans ces nouvelles formes de création.
En République démocratique du Congo et sur le pourtour du golfe de Guinée, une peinture dite « naïve » reprend, comme les masques dans les villages, les personnages d'une société urbaine contemporaine en crise : le fonctionnaire, le policier, la prostituée, la femme volage, le militaire, le buveur. Ils peignent, dans les cafés ou sur les murs, des scènes d'enterrement, une séance de pose chez le photographe ou une soirée au dancing. Certains n'hésitent pas à peindre des scènes historiques dénonçant les abus de l'époque coloniale : la construction du chemin de fer par le travail forcé, l'arrivée de l'explorateur. La République démocratique du Congo accueille ainsi certains des artistes les plus populaires d'Afrique, comme Chéri Samba, la coqueluche de Kinshasa, ou Tsibumba ; Frédéric Bruly-Bouabre est, quant à lui, le peintre le plus célèbre de Côte-d'Ivoire. La démocratisation qui a favorisé une presse hebdomadaire d'opinion a donné un support à la caricature politique directement issue de cette imagerie populaire.
La ville, où afflue tout ce que l'Occident déverse sous la forme d'emballages ou de mécaniques tombées en panne par manque de pièces de rechange, fournit les matériaux possibles pour un renouveau de l'expression artistique, cette fois à l'initiative du créateur seul qui devient un artiste au sens plein et non plus un artisan, fût-il de génie, contraint d'obéir à des canons esthétiques immuables. Le fer-blanc des boîtes de conserve a de multiples usages et le fil de fer de récupération, de Dakar à Brazzaville en passant par Lomé et Bamako, devient, entre les mains d'enfants qui n'ont pas d'autres jouets, camions, motos, bicyclettes, formule 1, avion ou navette spatiale.
- 2. Les difficultés de l’art africain
On ne peut pas parler de l’art sans mentionner les tentatives qui veulent en dépouiller l’Afrique.
Devant la richesse extrême de notre art, sa puissance d’intervention, de nombreux spécialistes européens tentent de lui trouver une origine extérieure. On peut dire d’une façon générale que toutes les études des Occidentaux sur l’Afrique sont déterminées par double point de vue :
Affirmer dogmatiquement que les civilisations africaines sont récentes, car rien ne saurais être ancien en Afrique.
Que l’origine de toutes les civilisations africaines dont on ne peut pas nier l’existence, doit être attribuée à de mythiques rejetons de races blanches (Chamites orientaux et occidentaux, arabes, Créto-libyens, colons grecs et romains, artistes errants de la renaissance).
Nous pouvons évoquer les difficultés que rencontrent les artistes africains contemporains. Ces derniers sont confrontés aux problèmes de moyen financier et matériel pour la réalisation de leurs œuvres. Aussi le marché national, premier client de l’artiste africain est quasi inexistant. Face à cette situation les artistes se tournent vers le marché extérieur pour commercer leurs œuvres d’art. Cependant ce marché reste médiocre car soit elles ne sont pas achetées ou elles ne sont pas bien payées si l’artiste n’est pas bien connu. Les œuvres d’art européen contemporain ont plus de valeur que celles venues de l’Afrique. Nous pouvons mettre en exergue le problème de formation des artistes africain contemporain, compte tenu de l’insuffisance des infrastructures de formation.
CONCLUSION
Au terme de notre analyse il apparait que l’art de l’Afrique Noire est très diversifié et très riche compte tenu de la multiplicité des sociétés africaines. Ces œuvres d’arts africains aux formes multiples ont une fonction utilitaire liée à la vie politique, sociale, religieuse, économique et culturelle. L’art africain contemporain quant à lui véhicule une autre forme d’expression artistique, car l’artiste contemporain crée des œuvres nouvelles à des fins esthétiques et destiné à la commercialisation.
BIBLIOGRAPHIE
- DELANGE J., 1967, Arts et peuples de l’Afrique Noire. Introduction à une analyse des créations plastiques, Paris, Gallimard, 273p.
- DIOP A. C., 1954, Nations nègres et culture, Paris, Présence Africaine, 390p.
- KASFIR L. S., 2000, L’art contemporain africain, Paris, Thames et Hudson, 224p.
- Ø LAUDE J., Les arts de l’Afrique Noire, Paris, Chêne, 179p.
- Ø LEMOINE S., (dir ; de), 2010, L’art moderne et contemporain, Paris, Larousse, 311p.
- Ø www.africanartists.blogspot.com 18/07/12, 10h
A découvrir aussi
- La question de l'immigration aux Etats Unis d'Amérique
- Les causes de la traite négrière
- Les conditions de voyage vers l'Amérique
Inscrivez-vous au blog
Soyez prévenu par email des prochaines mises à jour
Rejoignez les 177 autres membres