CLUB D\'HISTOIRE JOSEPH KI-ZERBO DE KOUDOUGOU

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Les résistances en Afrique noire: cas de l'A.O.F.

INTRODUCTION

 

L’Afrique Occidentale lors de la conquête coloniale avait de puissants royaumes traditionnels. C’est dans cette partie que les rivalités ont été vives. C’est aussi la zone de fortes résistances à la pénétration coloniale. Soucieux de perdre leurs valeurs culturelles, leurs trônes et leurs richesses, les chefs locaux vont opérer des résistances farouches dans plusieurs parties de ce territoire Ouest-Africain. Ces résistances ont été organisées par des royaumes animistes et des chefs musulmans qui assimilent la guerre contre les blancs à la guerre sainte. Malheureusement, ces résistances ont été vouées à l’échec.

Dans les lignes qui suivent, nous montrerons comment ces résistances se sont déroulées dans les différentes parties de ce territoire avant de nous pencher sur les causes de leur échec.

 

 

                                                       I -        Les formes de résistance

 

1 -  la résistance active

 

Plus la colonisation se développait en Afrique Noire, plus la résistance armée devenait difficile. Les européens confisquaient les armes et imposaient un contrôle toujours plus strict aux régions qu’ils contrôlaient. Quelques chefs guerriers entrèrent alors dans la clandestinité. Aidés de bandes armées, ils pillaient les colons, détruisaient leurs récoltes, attaquaient les administrateurs et les commerçants en déplacement. Ils étaient aidés dans leur lutte par les paysans. Par  exemple, cette forme de résistance se manifeste lors de la prise de Ouagadougou.

 

2 -  la résistance passive

 

Les populations africaines recoururent souvent t à la résistance passive. Elles refusaient de payer les impôts, de participer au travail forcé, d’effectuer les cultures obligatoires ou de s’enrôler dans les armées coloniales. Elles inventaient mille et un stratagèmes pour échapper au colon. Certains groupes s’enfuyaient quand l’administrateur faisait sa tournée dans leur village, des populations sédentaires devenaient nomades, se cachant dans les montagnes et les forêts et changeant sans cesse d’implantation. D’autres groupes ne présentaient que les infirmes et les malades aux recrutements, pour éviter le départ des jeunes et des adultes nécessaire à l’économie rurale. Les cultures obligatoires étaient négligées voire sabotées. Une autre forme de résistance passive fut le rejet par les populations des chefs nommés par l’administration marquant par là un grave défi à l’autorité des commandants. On  rencontre ce fait au Yatenga lorsque l’administrateur de Ouahigouya se mêla des problèmes de succession pour écarter les fils de Saga du pouvoir. Cette résistance passive se prolongea pendant toute la période coloniale.

 

 

                                                     II -      La résistance des peuples islamisés

 

1 -    L’empire toucouleur d’El Hadj Omar Tall (1797-1864)

 

El hadj Omar Tall, d’abord connu sous le nom d’Omar Seydou Tall, naquit en 1797 à Podor dans le Fouta Toro, centre de l’ancien royaume de Tékrour. Il est le chef de la confrérie musulmane de Tidjania. Il avait regroupé sous sa domination les territoires du Sénégal, de la Gambie et du Fouta Djalon. Comme la plupart des chefs africains, il était résolu à défendre son empire et à y préserver l’indépendance et la souveraineté. Pour atteindre ses objectifs, El Hadj Omar Tall choisit une stratégie d’alliance et d’affrontement militant. Il a lutté contre la colonisation française au Sénégal. Son expansion vers l’Ouest se heurte à la résistance du poste de Médine défendu par Faidherbe (gouverneur du Sénégal). Vaincu par ce dernier, il se réfugie au Soudan(Mali) où il meurt en 1864.

Après sa mort, son fils Ahmadou lui succéda et poursuit la résistance contre les français. Ahmadou veut garder ses conquêtes du Macina et du Kaarta ; il s’installe à Ségou, mais il doit faire face aux difficultés provoquées par l’avancé des français vers le Niger. Vaincu en 1890 par le commandant Archinard, Ahmadou s’enfuit à Sokoto où il meurt en 1898.

 

2 -  L’empire wassoulou de Samory Touré

 

Samory est né vers 1830 à Manyanbaladougou dans la région de Kankan en Guinée. Commerçant dioula, devenu prince marchant, il constitua un empire dans le Haut Niger avant de se convertir à l’Islam vers 1880. Il se heurta alors aux français qui espéraient prendre le contrôle de l’Afrique Occidentale. Samory possédait une puissante armée équipée de fusils fabriqués par ses forgerons, qui lui permet de mener une longue guérilla. Sa résistance inspirée du djihad dura ainsi 17 années. Mais en 1891, une garnison  prit Kankan et incendia Bissandougou. En 1892, l’armée française envahit l’empire de Samory. Celui-ci refusa de capituler et entreprit une migration vers l’Est en pratiquant la tactique de la terre brûlée. Au Nord de la Côte d’Ivoire, les troupes de Samory prirent Kong, Bouna et Seguela et conquirent un nouvel empire. Samory espérait s’être mis à l’abri des européens en se retranchant à Guelemou (Nord Côte d’Ivoire).  Mais l’avancé des français et des britanniques l’obligea à reprendre la lutte. Le 29 Septembre 1898, les français le capturèrent ; il fit alors fait prisonnier. Ainsi, il est déporté au Gabon où il trouva la mort le 02 Juin 1900.

 

3 -  La résistance de Babemba de Kénédougou

 

Tiéba, roi de Kénédougou est parvenu au pouvoir en 1886 et fonde la ville de Sikasso qui devient la capitale. Malheureusement, Tiéba mouru empoisonné en 1893. Son frère Babemba lui succède au trône et rompt avec la France. En effet, il refuse l’installation d’un résident français et d’une garnison française à Sikasso. Aussi refuse-t-il de payer le tribut annuel à la France. La France envoi  le capitaine Morisson pour négocier en Janvier 1898 dans la région du Kénédougou. La France exige le payement du tribut ; elle demande également à  Babemba de garder la neutralité dans la campagne avec Samory. La France demande enfin d’accepter l’installation d’une garnison à Sikasso. La réponse de Babemba était la suivante : « je ne donnerai jamais un morceau de terre (…) les blancs sont des traitres (…) ils veulent me retirer mon patrimoine ».

Le 15 Avril 1898, le lieutenant colonel Audeoud arrive à Sikasso avec un détachement de l’armée française. Sikasso résiste jusqu’au 1e  Mai 1898 à quatre (4)  heures du matin. La ville fut détruite après un long siège. Elle tombe sous les coups de l’armée coloniale. Babemba se donne la mort dans son palais avec 200 membres de ses sofas.

 

 

                                            III -      La résistance des peuples animistes

 

1 -  Le moogho

 

Le Moogho Naaba Wobgo dit Boukary Koutou a refusé de placer son royaume sous protectorat français. Alors, pour conquérir le royaume mossi, les français ont envoyé une première mission commandée par le capitaine Destenave. Cette mission qui est partie de Bamako, a réussi à occuper le Yatenga en 1895, mais à échouer contre le royaume de Ouagadougou.

C’est pourquoi une deuxième mission, commandée par Voulet et Chanoine pour occuper forcement le royaume de Ouagadougou. Elle réussit en effet à conquérir le Passoré (Yako) et poursuit sa route vers Ouagadougou. Le 1er Septembre 1896, Naaba Wobgo prit la fuite et se réfugia à Gambaga au Ghana. La ville de Ouagadougou fut donc prise sans résistance par les français. Plus tard Boukari Koutou essaya de reconquérir son trône en comptant sur l’aide des anglais parce qu’il avait signé un traité de protectorat avec eux par Fergusson en 1894. Pour éviter un conflit entre la France et l’Angleterre à propos du Moogho, un accord entre les deux puissances fut trouvé selon lequel le Moogho revient au français.

 

2 -  Le royaume d’Abomey(Dahomey)

 

A Abomey, le roi Béhanzin organise la résistance contre les troupes françaises dirigées par le colonel Dodds, mais le roi Toffa, cousin de Béhanzin installé à Porto-Novo accepte la présence des français.

Le colonel Dodds, aidé par ’’les tirailleurs Sénégalais’’, engage une compagne militaire contre Béhanzin de 1892-1894.

Les français se heurtent à une résistance héroïque des amazones (jeunes filles guerrières), mais malgré cette résistance, toute la capitale du royaume est occupée en 1892. Béhanzin poursuivit la lutte, mais est trahi par son frère Agoli Agboli. Il est ainsi capturé en 1894 et est déporté à Blida (Algérie) où il meurt en 1906.

 

3 -  La confédération Ashanti

Depuis le milieu du XVIIe siècle, le puissant empire Ashanti résista à la Grande Bretagne qui tentait d’en prendre le contrôle. A partir de 1824, les deux pays usèrent tantôt de la diplomatie, tantôt de la guerre sans parvenir à un accord. En 1874, la Grande Bretagne infligea une sévère défaite à l’Ashanti. Peu à peu, l’Ashanti commença à se désintégrer : encouragés par les britanniques les Etats vassaux se rebellèrent contre son autorité ; les querelles de succession se dégénèrent en guerres civiles. En 1888, un nouveau roi Prempeh rétablit l’ordre et tenta de redonner sa puissance à l’empire. Inquiet, les britanniques attaquèrent l’Ashanti et en 1896 prirent Koumassi, la capitale. Devant la puissance de son adversaire, Prempeh préféra se soumettre et accepta le protectorat britannique. L’Ashanti fut intégré à la Gold Coast, colonie britannique. Mais la population poursuit longtemps la résistance.

 

                                              IV -    Les causes de l’échec des résistances

 

Les résistances africaines ont été de courtes durées pour les raisons suivantes :

 

1 -  Manque d’unité

 

 Le manque de solidarité entre les chefs africains a été un  obstacle aux résistances. En effet, ils se trahissaient et se faisaient même la guerre au lieu de s’unirent contre l’ennemi commun : le blanc.

Par exemple Tiéba a lié amitié avec les blancs pour combattre Samory, Tofa a lié amitié avec les blancs pour combattre Béhanzin, Samory Touré détruisait ses hommes par sa tactique  de la terre brûlée ; le refus d’alliance de El Hadj Omar Tall à Samory précipite l’écoulement de son empire devant les forces du général Archinard.

Notons aussi que le manque d’unité est lié aux différentes querelles de succession dans de nombreuses régions de l’Afrique. En effet, certaines régions ont été déjà affaiblies par les crises de succession au trône. De ce fait, certains chefs faisaient appel aux colonisateurs afin de les aider à combattre leurs frères ennemis. Par exemple………

 

2 -  Infériorité technique de l’armement

 

Sur le plan militaire, les européens étaient supérieurs aux africains. En effet, pendant que les européens combattaient avec les armes à feu (fusils, canons…) nos frères africains combattaient avec des armes blanches (flèches, gourdins, lances, épées…)

Il faut dire que les africains étaient mal organisés. Ceux-ci allaient à la guerre en rang dispersé contre les européens qui étaient bien organisés et puissamment armés. Aussi dans la plupart des sociétés, l’armée se formait à la hâte pour faire face à une situation qui se présentait et cela ne lui permettait pas d’être efficace (manque d’armée permanente dans certains royaumes).

 

 

Conclusion

 

 Les résistances ont été menées diversement en Afrique de l’Ouest. Des raisons multiples ont expliqué la défaite des africains tant sur le plan militaire que technique. Il est par ailleurs indéniable qu’une alliance des africains conjuguée au courage et à la détermination changerait la donne. Cet échec constitue le point de départ d’une large domination de l’Occident sur l’Afrique aussi bien sur le plan politique, économique que culturel. Domination qui est perpétuée jusqu’aux années 1960, années au cours desquelles théoriquement les colonies françaises prennent leur indépendance vis-à-vis de l’ancienne métropole.

 

 

 

 

 

 

BIBLIOGRAPHIE

 

1 -  Boahen A (dir), 1987, Histoire générale de l’Afrique : Tome VII, l’Afrique sous domination coloniale, 1880-1935, Paris, UNESCO 298p

2 -  Cours d’histoire Geographie (classe de 3ème)

3 -  Histoire 3ème, le monde contemporain de 1815 à nos jours ; éd Edicef

4 -  Histoire 3ème, l’Afrique et le monde, éd Hatier

5 -  Zerbo J.K, 1968, Le monde africain noir : Histoire et civilisation, Paris, Hatier, 95p

 

 



24/09/2012
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